peuxiéme Année, Ne 497. PORT-AU-PRINCE ( Hair ) Mardi, 24 Novembre 19808 Le Matin QUOTIDIEN pre Abonnements: Dmscravr: LE NUMERO 45 — PORT-AU-PRIN ve eh ° 6. 00 Clément Magloire, —_— DEPARTEMENTS) Un Moss. : . « 2.20 Les abonnements partent du 1~ et du 1s de chaque Tross Mois Tro Mors. « 6.00 « 8.00 REDACTION-ADMINISTRATION 45, RUE ROUX, 45. mois et somt payables é’avance Les manuscrits ineérée ou Bon Be sesent pas seaées RD Pour tout ce qui conoerne l’Administration du Journal, s'adresser a Monsieur Arthur ISIDORE, 45, Ruz Reuz on Bonse-Fel. RECULER POUR MIEUX SAUTER A Santiago de Cuba, je fus frappé de ans un capital de huit 4 dix mille dol- wirun cabrouetier. Son cabrouet était as plus grossiers, un cabrouet plat omme ceux Prince au transport des briques et des factor. Cela ne faisait qu’augmenter | besatraste entre cet instrument de | tilt celui qui s’en servait. Car le | gresetier Stait un muldtre aux traits , da ot distingués, au teiat frais, jeune 4a t beau, les yeux intelligents, hesevelure fine et noire soigneusement ignée sous un Chapeau de paille a lar- pa bords ; i! dtait chaussé, portait un talon de casimir usé, une chemise de ne fermée au cou par un cordonnet fe lenait lieu de cravate ; pas de veste. son fouet 4 laniére, il tapait sur sa ule, et le cabrouet filait avec de forts ahotements qui faisaient danser I’hom- msurson sidge. Je vanais de débar- quer, le spectacle me surprit : En Hai- t, jen'avais vude gentleman sur un @brouet qu’aux jours de carnaval... Je fis part de mon étonnement a l’ami qui était venu 4 ma rencontre: C'est unsl qué vous avez de beaux cabroue- ley ici, lui demandai-je ? Mais cet me la n’a pas l’air d’un homme du ommun, sa personne parait bien soi- —llyen a beaucoup comme lui f¥ sont cabrouetiers, répondit mon wai. Je connais celui-ci, j'ai connu son vee ddl Occupait une assez bunne po- hes > Mais la famille a été ruinée la guerre de IIndépendance. Ce me que vous venez de voir epanoée derniére chef de Bureau enpoate d'ici ; ila tout laché, le mon- il vivait et les élégances trop ws kona, pour ce qu’il gagnait ; avec ds omies, il a acheté ce cabrouet bp fait cabrouetier. Il ne fréquen- bee son monde d’autrefois, ne dé- 8 b adie ue rien, et fait en moyenne coli: ollars par jour, car le moin- Mente S$ qail transporte, c’est cin- Heit | centimes, or américain, s'il vous | per mois, et faisant travailler Méenomies p ies dant qu'il conduit "ebrouet, if posséders d'ici trois 1 qui servent 4 Port-au |a une entreprise agricole ou industrielle | lars, il achétera un fonds d’épicerie, ou une pharmacie, ou bien se livrera quelconque, et personne ne lui repro- chera d’avoir 6t6 cabrouetier. Et en ad- mettant méme que cela pit ctre. il n’eurait qa’a aller s’établir & la Hava- ne ou 4 New-York, ou personne ne con- naitra son passé, d’autant plus ques son instruction et son éJucation lui per- mettront de faire bonne figure dans la société a@ laquelle il avait d’abord ap- partenu. It ne rougit pas de son état, il sait ce qu'il fait ; il n’était qu’un employé & la poste, aujourd’hui il gagne plus quo le Directeur des Postes. Et, que voulez- vous, l’argent, ce n’est pas tout, Mils c’est presque tout ! Il ne regarde pas le préseni, encore moins le passé, car il espere monter plus haut que ne fut son pére; dans ses réves, il se voit millionnaire, pro- priétaire de grands établissements, pa- tron de beaucoup d’employés, et hue, et clac, il fouette sa mule avec cette di- gnité d’un homme qu’un char doré em- porterait vers la fortune et vers la gloire! » J’écoutuis de toutes mes oreiiles, |C’était crevant de logique, et alors un mot me revint 4 l’esprit, qui m- dit un jour par un camarade: « Voyez- vous, pour faire fortune, il oe me man- que rien; au contraire, je naurais rréussir qu’A perdre tout ce que j'ai, moa dernier sou, moa dernier p2- tent, mon dernier ami, mon doarnier brin de ce faux orgueil qui nous fait mourir de faim plutét quede condes- cendre a certaines taches. Ah! que ne suis-je un va-nu-pieds ! comme je fe- rais fortune ! » Cette histoire du cabrouetier cubain fera sourire plus d’un. Quoi cependant de plus beau qu’un 3 4 co qu'il fait, qui a entrepris une be- sogne inférieure pour ne pas conlec a fond, qui y cherche courageusement les mo uniaires de réaliser ce "il rea ee tal de beaux projets ? Re vo pas que s'il recule, c est pour mieux sauter ? — Et quoi donc, 4 moi qui souffre, qui travaille pour cing ou dix dollars par mois ou qui ne travaille pas du tout, voudriez-vous me proposer de me faire cabrouetier ? — Pas précisément! Je sais bien que noblesse oblige et qu’on ne peut pas déroger. Mais quelles racines vous enchainent au sol natal ou vous étes connu ? Quand tous les peuples et mé- me les syriens immigrent en Haiti, pourquoi seuls les Haitiens n’émigre- raient-ils pas ? Ne serait-ce pas qu’ils manquent d’énergie et de constance, ne serait-ce pas qu’ils ne sont pas sou- tenus par une haute et saine ambition, qu’ils ne sont pas possédés d’un_idéal si chérement convoité que l'on sacri- Température} fie tout a sa réalisation ? POITS DIVERS RENSEIGNEMENTS METEOROLOGIQUES Observatoire DU SEMINAIRE COLLEGE St-MARTIAL Lunpi 23 NOVEMsaE Barométre 4 midi 760," 3°/* minimum at. 2 maximum 30. 5 Il y a cepen-fant des Haitiens qui ont| Moyenne diurne de la température 25.2 essayé et qui s’en sont tres bien trou- vés. Je pourrai3 citer notamment un (jeune homme d’une des toutes premieé- | | homme supérieur | q (tr nn nan res familles du pays, qui n’ayaat subi aucun mauvais traitement de la part de ses parents, enlevé seulement par un grand souffle didéal et trouvant notre pays trop étroit pour l’épanouissement de ses réves, s’est sauvé ad l’dge de quin- ze ans du toit paternel,et sans protec- tion ni recommandation d’aucune sorte, a osé affronter la vie américaine. En- tré comme « boy » dans un grand H6- tel restaurant de New-York 44 dollars par semaine, ilétait devenu quand je l’ai vu, trois ans aprés, le caissier de | Hétel me fut jet homme de confiance du_ patron. II parlait le frangais, l'anglais, |’alle- mand, lespagnol, ayant appris ces deux derniéres langues autant dans ses livres que par son commerce quotidien avec les pensionnaires de _ J’établisse- ment. Il avait le logement, la nourritu- re et cent cinquante dollars d’appoiate- ments par mois. Exubérant de santé, dé- bordant de satisfaction, comme je le félicitais de saposition, il me dit : « Ce n’est rien, ce n’est qu’une étape, j'as- pire a étre patroa moi-méme, et j’aspire plus encore, mais on ne doit parler ue deson réve prochain... En tout cas, me dit-il ensouriant finement, vous ne me demandez pas si je retourne dans la douce Haiti of les gens sont heureux pourvu qu’ils ne meurent pas de faim. Ici, un homme n’est jamais arrivé ; la bas, personne ne se met en marche... » Ciel un peu nuageux le matin, presque clair l’aprés-midi. Le barométre est toujours en baisse. J. SCHERER Taft et Bryan apres l’élection Répondant 4 une demande sur sa santé, M. Taft dit : — Je suis en excellente santé, mais fati- gué. M. Taft est inondé de félicitations, y compris celles du pape. On ne peut dou- ter que les catholiques, spécialement dans "Etat de New-York, aient voté pour le candidat républicain. M. Bryan a envoyé 4a M. Taft un télégramme de félicitations et de bons souhaits pour le succes de sa résidence. Le candidat battu est dit-on e ués bonne homenur, et il déclare qu'il est aussi heureux batta qu’éle. Il a fait hier deux discours a ubpcola und des amis et l’autre, dans la soirée, i quet donné VAssociation des instita- teurs de la Nebraska, dans lequel il a dit : —— Je n'ai jamais eutrés a coear d'etre élu, mais j’éprouvais le besoin de faire un certain travail, et il me semblait que la présidence pouvait m’en offrir l’occasion. M. Taft a réponda au télégramme de fé- licitations de M. Bryan, remerciant ce der- nier de son télégramme courtois et cordial. M. Roosevelt Journaliste M. Roosevelt a si un contrat le~ quel il accepte les ions de jen chef adjoint {Associate Editor, de ?’'On- tlook, aprés qa’il aera quitté Is présidence.