Deuxiéme Année, No. 390. PORT-AU-PRINCE (Hair) Lundi, 20 Juillet 1908 ABONNEMENTS : PURT-AU-PRINCE) Uw Mois. DEPARTEMENTS)\ Trois Mots. ETRANGER Trois Mois. le me propose aujourd’hui de tou- cher’ un sujet en apparence politi- queet yui, de fait, absorbe générale- ment la plus grande partie dex préoc- cepations du pouvoir. Je veux parler ds « propagandistes » politiques. Et fi me laisse cette fois tenter par af tel sujet, cest qu'il me semble avait quelque droit sur lui ; car si le ¢ propagandiste » politique, en exer- faatson art bizarre et original, pro- duit des effets nuisibles ala pax spublique et qui, ace titre, ne peuvent aisser le pouvoir indifférent,— il nest pas moins vrai que cet étre in- forme et dangereux est le produit na- furcl de notre état social. On sent déja l’importance de notre point de vue : sans anticiper sur led‘- Yeloppement de mon sujet, je puis weer entrevoir ma conclusion, a sa- dir que, pour supprimer la propa- Wande, il faut supprimer le propagan- F te, dela méme manieére qu'il fau- erat arriver 4 supprimer le bananier ee voulait ne plus avoir de bana- hen Mais, de méme que, en dépit de tiePression du bananier. la terre tam e en bananes| réserverait cons- et des surprises tout le temps : aol les aménagements appropriés ¢ ‘aurait rendua soit réfractaire a Culture, soit utilisab'e A la pro- sine i d'autres cbo3es que le bana- wives” la méme facon, on ne peut de | Couper court 4 la produc- le « proneg pociale représentée iste » politique Wen remplacant notre état social par Social réfractaire & cette tris- Spa ction. » Jai touché Ace sujet dans 4 le tempérament hailien ov, in rectangle des Déclassés ns le tracé figuratif de ta : lienne, j'ai écrit: « C’est ectangle des Déclassé3 ‘que quartier-général des po- @ Cette surte de rebuts he peuvent vivre que de ents politiques et qui sans cesse d'appeler nouveaus gulls arri- cs DIRECTEUR: G. 4. Clément Magloire, « 3.60 ae 6 REDACTION-ADMINISTRATION « . Pour tout ce qui concerne l Administration du Journal, s’adresser a Monsieur Buc du « Propagat » | vent parfois, en temps de paix, a ha- ter et a précipiter par une propayan- de des plus démoralisantes, et que, en temps de troubles, ils réussissent. avec quelque art, a éterniser, pour leur seul profit et au grand dommage du Pays. » Yest donc la présence dans notre. société d’ug trop grand nombie de Déclassés gui crée, 4 défaut d’autre, plus honorable, l’étrange industrie des « prcpagandistes. » Et l’existence des Déclassés commence malheureu- sement avec notre histoire méme. Je vais l’étab!ir en deux mots. D’aprés les statistiques les plus rela- tivement dignes de fui, le nombre de la populatiou de la parjie frang sise de Saint Domingue, s’élevait, al époyre des guerres de l’indépendance 4a en- viron 405,000 esclaves, 38,000 blancs et 30000 affranchiset hommes de couleur. [La besogne qui occupait cette population variée peut etre, gros so modo, déterminée comme suit: La plus g ande partie des esclaives étaient attachés au travail des habita- tions ; le reste, libre de tout engage- ment, rOlait et maraudait dans les parties les plus reculées des campa- gnes. La populatioa blanche était répartie une partie dans les travaux de direc- tion et d’administration des habita- tions, une partie dans les travaux des villes et des ports ; et le reste, com- posé de « fila de famille », pérorait. dans les parties de plaisir, les réu- nions, les assemblées politiques et au-— tres bamboches pareilles, et auss} encombrait les administrations pu-— bliquee. | La population des affranchis et des hommes de couleur renforcait les rangs de cetle derniére classe de la population blanche et, les privileges en moins, flottait a la surface de la société coloniale, inoccupée et nali- vement déclassée... . L’orage survint, car toutes les con- ditions de cette atmosphére coloniale | lui étaient favorables, et la bourras- | qae emporta dans uD méme tourbil- 45, RUE ROUX, 45. a z= ‘lon toute la population ateliers ruraux et les villes : HT a- tiens naquitent surun mseceau de ruines. QOu’est-ce qui forminait cette nation haitienne? L’union des esclaves, de- venus libres, des atfranchis noirs et des hommes de couleur: Paneienne société retrouvait, Pesclavape et oppression en mvins, muis aussi le travail et tes dispositions au travail en moins, dune fagon eeénerale, du moins. C’est a plier au population leborieuse que, avec plus ou moins de succés, se sont évertués la plupart de nos gouvernants. kh bien, Dieu me garde diétre proplicte de matheur : ils n’y) téussironte pos dans Vavenir, pas plus qa’iis my out réussi dans le passe. I? travail organisé cto oinéthodiypue ne pourra jaMats exister, fanidats we - villes que duns les) Campa ies. ue partes suins de Ueéliie nationale po bony effireace ment protegéee dans ce sens par le gouvernement. Mais cous avons vu que les) oripi- daus Tes se nes de cette élite se rctrouvent fancienne classe des affranchis et des mulatres ; or, cette classe a fou- jours Mangqueé 4a son rdle patronal, bie nyo a pas lO dressée par les colons ; elfede lear a rude:ment fait sentir en cConduisant les esclaves a la wuerre. De nos jours, elle continue a déser- ter ee rote «et elle le dé-erte dans les pires conditions . sociales Qul se puissent imayiner : elle ablorre la vie rurale et les travaux munuels et pour- tunt eile est assoiffée de richesse ; e!le- aspire constamment a la vie facile, | et envi ag2 ainsi le repos sans Il’effort | pénible qui l’autorise et le rend sain. De 1a, Je développement exagéré de, deux tendances maitheureuses et mal-' faisantes, et la création d'un courant | sucial absolument néfaste. | Cas deux teadances sont : l’accapa-: rement des fonctions publiques qui | paraissent le plus stir moyen de réa- | liser une fortune rapide ; ensuite l’ex- croissance démesurée d-s professions. les, qui paraissent l'acheminement naturel aux situations politiques éle- vées. Quant au courant social néfaste, il est représnté par le mouvement d’é- arthur [SIDORF., 45, Ree Roux ou Bonne-Foi. blanche, les; micration Le atin» LE NUMERO 10 CENTIMES Les abonnements partent du 1** et du 15 de chaque mois et sont payables d’avance Les manuscrits insérés ou non ne seront pas rendus Se des ¢léments d’élite des Campacnes, vers les villes, résultat le peus évident de la cocruption urbaine set de sa propagation dans les campa- vues : les fils de paysans, 4 exemple des citadins, abandonnent peu a peu, eux aussi, La fonefion patronale. Quand, au sein d’une nationalité, le vide se fait ainsi, progressivement dans lafonction éminente depatronner le travail des incapables, ’envahisse- nent étranger est sollicité d’exercer lui-meme cette fonction. Cela est si travail Vancienne; vrai que nos publicistes les plus re- iMarquables, patriotes, ne rongissent pas d’atten- dre le relévement national et sans doute des plus des capi- taux et de Vintelligence exotiques ! Dans tous les pays du monde, lors- que Ja fonction de diryer Te travail avricole et industriel n’est pas exer- cee par les plus capables et les plus eoeves dans organisation sociale, UVa- nist cratic natarelle fait défaut. Et chia- gue fois que cette aristocratie natu- relie fait deéfaut. elle est remplacée par une sorte aristocratic artificielle représentée dans certains pays, comme la Norvece et la Suisse, par le clergé, et dans certains autres, comme la France et nous, par la puissance in- fellestiuelle. Jai sous les veux la collection com- plete de notre Bulletin officiel de Va- yriculture et de Viniustrie, et, excep- tion faite dun seul agronome, je vols que les conscils les plus techniques of- ferts a la culture anos paysans ( gui ignorent leur A BC ), sont formulés par des docteurs en médecine, des historiens et des avocats! Un pays, la France exceptée, ne peut étre plus complétement en proie aux ravages de cette aristocratie artificielle repré- sentée par la puissance intellectuelle, vraie ou adultéréa * @ * Que la désorganisation sociale soit le résultat d’une telle formation, rien n’est plus explicable, étant données 'nos origines nationales et les fausses directions adoptées par Il’élite natio- libérales et des cultures intellectuel- nale qui, de plus en plus, 8 cloigne 9 ae- de son role naturel de patronner griculture et l'industrie nationales. Que notre société, ainsi désorgani- sée par le manque de patronage privé, donne des produits tels que le révola-