4 ANNEE, N° 52. PORT-AU-PRINCE (naitt) MARDI, 4 JUIN 1907. LE MATIN | ABONNEMENTS : PAR MOIS 4 GOURDE. *f- DEPARTEMENTS & ETRANGER : Frais de poste en sus. QUO TIDIEN LE NUMERO A() CENTIMES.° Les abonnements parrent du rer.et du 15 de chaque mois et sont pays bles d’avance me DIRECTEUR: Clément Magloire, REDACTION-ADMINISTRATION 45, RUE ROUX, 45. Les manuscrits insérés ou non De son pas remis. Pour tout ce qui concerne l Administration du Journal, s’adresser a M. Arthur ISIDORE. — Fi Lonceptlon- Lali TRAV AIL. Je veux espérer que mes lecteurs n’attendent pas de moi, dans cet ar- ticle of: il s’agit du prétendu matéria- fisme de M. Demolins, que j’ouvre aucune discussion philosophique a ce sujet. Je ne m’en sens d’aillears ni la capacité ni le gout. Efi outre, cette iscussion ne me’ sérait guére aisée fié 'espéve, “6tant Gonné te’ vague dans lequel est enveloppé le reproche lancé par notre convive de l'autre jour. Pour toutes ces raisons, nous al- lons voir les choses avec Il’wil de tout le monde, dans _ les dispositions desprit du lecteur qui demande a son quotidien quelques minutes de passe- temps et qui ne me pardonnerait peat-ctre pas la surprise de lui parler philoso phie. “Eta tout prendre, j’aurais probable- Ment tort de prendre les choses de ‘op haut, puisque rien dans M.Demo- lins n’autorise 4 le suspecter de ma- térialisme et qu’il semble n’encourir ce reproche que parce qu'il donne ses préférences avisées aux idées et auxchoses qui ont cours dens des Milieux sociaux que leur esprit pra- tique a souvent exposés a la méme aecusation. le oirconscrirai donc ma tache a re- shercher 3’il est bien venu de croire que les sociétés soient plus onvertes aux idées matérialistes, parce qu’elles he se font pas un régime de la culture lntellectuelle supérieure, parce qu’elles sont moins encombrées— ou ne le note pas du tout— par les profession- ies de la pensée extatique sous tou- Ses formes. J’ai déja établi que ans Ces sociétés le niveau moral était a grand et le niveau moyen _intel- Dhe el plus élevé que dang celles ot fron’ des facultés individuelles, te té lntellectuelle, était cultivée fare ; un simple tableau_com- cd a genre de vie pratiqué dans ‘Meux sortes de sociétés et de est en nous, toutes les difficultés de la vie. Compte ensuite sur nos parents, sur nos amis, quiv te pousseront, qut te recommanderont, pour t’aider a trouver une carriere. Gompte en- core sur le vouvernement qui dis- pose d’une) quantite innombrable de places ; on v est. bien tranruilte, on ne court aucun aléa, on est pavé réguli¢rement a la fin de chaque mois, on a oun avancement automatique, par le simple mécanisme des retraites et des déces ; si bien que tu peux sa- voir d’avance qu’a tel age tu gayeneras tant, A tel aye tant, et enfin qua tel age tu auras ta retraite, une bonne petite retraite; en sorte que, apres n’avoir pas fait grand’chose pendant toute la vie, tu pourras ne rien faire du tout 4 un aye ou un homme est encore capable ‘d’action. Mais, mon cher enfant, comme ces situations sont assez peu rétribuées, car on ne peut pas avoir tons les. avantayes a la fois, il faut que tu comptes encore sur ce que ta femme pourra tlappor- ter. Il faut donc chercher avant tout une femme riche ; mais ne t’en in- quiéte pas, nous te la chercherons, nous te la trouverons. Voila, mon cher enfant, les conseils que nous dicte notre amour pour tol. » « Une telle conception de la viea pour résultat dengourdir, datrophier la volonté, l’énergie, la virilité ; elle rend homme moins propre a l'elfory elle le porte plus & éviter les difficul- tés qu’a les vaincre ; on recherche ce que la vie a d’amusant et on écarte ce qu’elle a de sérieux ; ainsi on devient moins aptes 4 cette action morale, qui exige essentiellement |’effort et le triomphe sur soi-méme. » Toutes ces citatfons, empruntées a M. Demolins, nous montrent claire- ment que le principe dominant, dans ’éducation des Latins et dans leur ‘leurs facons différentes de concevoir la vie m’aidera 4 démontrer que les idées matérialistes ftleurissent plus volontiers dans les sociétés latines. Et d’abord comment, dans celles- ci, est considérée la grande loi qui domine ’humanité : celle du travail? Je réponds tout de suite: dans le sens de la malédietion biblique: tu gagneras ton pain dla sueur de ton front. Le Latin, en général, ne se soumet Acette loi qu’A contre-cveur et faute de pouvoir |’éluder. Les parents diail- leurs s’arrangent de facon que les en- fants, durant leur existence, aient a travailler le moins possible. Ils éco- nomisent dans ce. but.avec acharne- ment, et en France notamment, pour amasser sur la téte des enfants le plus de provision possible, ils mettent une contrainte a leur puissance prolifique et s’astreignent A faire peu d’enfants. La constitution de la dot étant la prin- cipa'e préoccupation du pere etde la mere francais, ils se décident & mettre au monde peu d’enfants, afin d’avoir ‘peu de dots a réaliser. « Sous linfluence de leur formation communautaire, dit Demolins, qui faitde la fortune un bien de _ famille et non un bien personnel, les parents considérent comme un devoir de se dépouiller de leur vivant pour doter leurs enfants au moment de leur ma- riage. Ils sont ainsi dans Vobligation de constituer, en quelques années, autant de fortunes qu’ils ont d’entants, alors qu’il est déja si difficile, pour tout homme, de se constituer une for- tune personnelle! C’est la une cauvre absolument impossible, tellement 1m- possible que nous n’avons pas trouvé d’autre solution que de restreindre le nombre de nos enfants. » Le méme auteur concéde que la _ limitation du nombre des enfants en France nalt te de s’attribuer une plus sir égows l ; : sande somme de jouissances. » Et|conception de la vie, est celni de la voici. le langage qu’il met dans la moindre action. Dans l’action elle-mé- bouche des parents francais 4 l’a-|me, au plus fort de l’exercice du tra- vail, leur réve est encore le farnicnte, dresse de leurs enfants : « Mon cher enfant, compte d’abord sur nous ; tu vois comme Rous é€CO- nomisons pour pouvoir te donner, au moment de ton mariage, une dot aussi forte que possible. Nous ’'aimons trop pour ne pas vaplanir, autant qu il le bonheur de pouvoir se dérober au travail, le souci constant d’auymenter la somme terrestre de jouissances au détriment de Ja part faite au travail. La faculté dominante du tempéra- ment latin, et surtout francais, c’est